Bulletin de sociologie religieuse (106-4/2018)

par Jean-Marie DONEGANI

octobre-novembre 2018 - tome 106/4

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Bulletin de sociologie religieuse

parDONEGANI J.M. Jean-Marie Donegani

Sciences Po – Paris
 
 

I. Théorie de la religion, histoire de la sociologie
religieuse (1-4)
II. Attitudes et comportements religieux (5-11)
III. Religion et espace social (12-18)
IV. Religion et politique (19-24)

Ce second bulletin de sociologie religieuse est moins long que le précédent (voir RSR 103/4 [2015], p. 605-628) car il ne couvre que les trois dernières années. Les rubriques en sont moins nombreuses et, bien évidemment, leurs titres peuvent apparaître arbitraires dans la mesure où, très généraux, ils pourraient aisément être renommés ou les ouvrages qu’ils rassemblent déplacés d’une rubrique à l’autre. Ainsi en est-il notamment de la distinction entre « Religion et politique » et « Religion et espace social », puisque les phénomènes politiques sont aussi des faits sociaux. Quant à la première rubrique qui concerne d’abord la théorie de la religion, on y a adjoint deux ouvrages qui, traitant de l’histoire de la discipline dans la figure de deux de ses pionniers, dessinent aussi les traits de la construction scientifique de l’objet religieux telle qu’elle a été amorcée avant le développement des grandes enquêtes quantitatives et l’irruption du thème de la sécularisation, devenu le paradigme central de la discipline.

I. Théorie de la religion, histoire de la sociologie religieuse

1. Martin David, On Secularization. Towards a Revised General Theory, Ashgate, Farnham, 2012, 206 p.
2. Day Abbyn, Lövheim Mia (Éds), Modernities, Memory and Mutations. Grace Davie and the Study of Religion, Ashgate, Farnham, 2015, 272 p.
3. Hertz Robert, Sociologie religieuse et anthropologie. Deux enquêtes de terrain, 1912-1915, éd. et prés. de S. Biaciocchi et N. Mariot, « Quadrige », PUF, Paris, 2015, 432 p.
4. Bert Jean-François (dir.), Henri Hubert et la sociologie des religions, « Religions », Presses universitaires de Liège, Liège, 2015, 330 p.

II. Attitudes et comportements religieux

5. Garelli Franco, Religion Italian Style. Continuities and Changes in a Catholic Country, Ashgate, Farnham, 2014, 244 p.
6. Tranvouez Yvon (dir.), Religion(s) en Bretagne aujourd’hui, Centre de Recherche Bretonne et Celtique et Institut Culturel de Bretagne, Brest/Vannes, 2014, 284 p.
7. Stolz Jörg, Könemann Judith, Schneuwly Purdie Mallorie, Englberger Thomas, Krüggeler Michael, Religion et spiritualité à l’ère de l’ego. Profils de l’institutionnel, de l’alternatif, du distancié et du séculier, « Religions et modernités », Labor et Fides, Genève, 2013, 320 p.
8. Mallèvre Michel, Les évangéliques. Un nouveau visage du christianisme ?, « Que penser de… ? », Éditions Jésuites, Paris/Namur, 2015, 117 p.
9. Puzenat Amélie, Conversions à l’islam. Unions et séparations, « Sciences des religions », Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2015, 264 p.
10. Borghée Maryam, Voile intégral en France. Sociologie d’un paradoxe, Éditions Michalon, Paris, 2012, 256 p.
11. Godelier Maurice (dir.), La mort et ses au-delà, « Bibliothèque de l’Anthropologie », CNRS Éditions, Paris, 2014, 410 p.

III. Religion et espace social

12. Zwillinh Anne-Laure (dir.), Minorités religieuses, religions minoritaires dans l’espace public. Visibilité et reconnaissance, « Société, droit et religion », Presses universitaires de
Strasbourg, Strasbourg, 2014, 250 p.
13. von Busekist Astrid, Portes et murs. Des frontières en démocratie, Albin Michel, Paris, 2016, 224 p.
14. Béraud Céline, Galembert (de) Claire, Rostaing Corinne, De la religion en prison, « Sciences des religions », Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2016, 358 p.
15. Palmisano Stefania, Exploring New Monastic Communities. The (Re)invention of Tradition, « Ashgate, AHRC/ESRC Religion and Society Series », Routledge, New York, 2015, 195 p.
16. Hervieu-Léger Danièle, Le temps des moines. Clôture et hospitalité, PUF, Paris, 2017, 710 p.
17. Brejon de Lavergnée Matthieu, Della Suda Magali (dir.), Genre et christianisme. Plaidoyers pour une histoire croisée, « Les cahiers de l’AFHRC », Beauchesne, Paris, 2014, 416 p.
18. Cuchet Guillaume, Comment notre monde a cessé d’être chrétien. Anatomie d’un effondrement, « La couleur des idées », Seuil, Paris, 2018, 224 p.

IV. Religion et politique

19. Norris Pippa, Inglehart Ronald, Sacré versus sécularisation. Religion et politique dans le monde, Éditions de l’Université de Bruxelles, Bruxelles, 2014, 480 p.
20. Horn Gerd-Rainer, The Spirit of Vatican II. Western European Progressive Catholicism in the Long Sixties, OUP, Oxford, 2015, 264 p.
21. Martinez Andrade Luiz, Écologie et libération. Critique de la modernité dans la théologie de la libération, Van Dieren Éditeur, Paris, 2016, 320 p.
22. Koussens David, L’épreuve de la neutralité. La laïcité française entre droits et discours, « Droit et Religion », Bruylant, Bruxelles, 2015, 211 p.
23. Béraud Céline, Portier Philippe, Métamorphoses catholiques. Acteurs, enjeux et mobilisations depuis le mariage pour tous, « Interventions », Éds de la Maison des sciences de l’homme, Paris, 2015, 208 p.
24. Portier, Philippe, L’État et les religions en France. Une sociologie historique de la laïcité, « Histoire », Presses universitaires de Rennes, Rennes, 2016, 363 p.

Deux traits semblent caractériser l’ensemble des ouvrages recensés. Le premier concerne le retour heureux d’enquêtes de terrain qui fondent les développements de plus des trois quarts des publications. Même si certains n’ouvrent pas sur des perspectives nouvelles conduisant à réviser le tableau aujourd’hui dominant de l’état religieux de nos sociétés, il reste qu’ils l’enrichissent et l’illustrent de manière souvent très suggestive. Le second trait touche à la persistance et même au renforcement du paradigme de la sécularisation, dominant dans la discipline et quelquefois, ces dernières années, remis en cause par certains auteurs en raison d’un supposé « retour du religieux ». Or, ce que l’on associe à ce thème apparaît soit discutable dans son effectivité (il en est par exemple du lien entre religion et politique), soit inopérant pour asseoir une révision des théories de la sécularisation. Il est clair en effet, que le pluralisme, la désinstitutionnalisation et le subjectivisme qui marquent le rapport de nos contemporains aux réalités religieuses sont perceptibles sur tous les terrains que défriche la sociologie empirique. Ainsi en est-il des études concernant la vie monastique, la pratique de l’islam, l’usage des spiritualités alternatives, le renouveau évangélique, etc. Il n’est pas jusqu’aux réactions intégristes (dont il n’est pas question dans ce bulletin) qui ne soient marquées par l’affirmation de la souveraineté de l’individu sur ses choix religieux. On est ainsi entré décidément dans une ère nouvelle des rapports à la religion qui signe l’effondrement des systèmes d’emprise et de la logique d’appartenance au profit d’une conception pragmatiste de la croyance et d’un triomphe de la logique d’identité.

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